La flèche d'or [Par Livedell]

C'est une petite flèche en or qui tourne et s'arrête pour désigner ceux "qui cahe un secret", elle fut utlisée pour démasquer les Drows et les "vrais" namidas.

Ghan D'Ilf

De nombreuses légendes gravitent autour du peuple Namida, ces Elfes si évolués par rapport aux nombreuses communautés qui peuplent les bois et vivent en complète autarcie...
Des mythes qui deviennent des histoires contées, de générations en générations, à tous les petits Elfes, le soir autour du feu.

Ainsi, moi Livedell, du temps où je vivais encore en ma lointaine contrée et où les Namidas étaient pour moi un peuple faisant figure de modèle et d'avenir, j'ai écouté avec passion bon nombre de ces récits.
Le vieux Aldéren y mettait tellement de cœur... C'est sûrement pour cela que, même encore aujourd'hui, je me souviens de tout.

Parmi toutes les légendes qu'il me fut donné d'entendre, il en est une qui m'a spécialement marquée et à laquelle je pense souvent... Certainement car ma vie fut dévouée, comme celle de son protagoniste, à la magie...
Je n'ai pas le talent de conteur que l'ancêtre de mon village possédait, néanmoins je vais faire de mon mieux pour vous la narrer...

Un jour de plein soleil, sur les rives de L'Elmasa, un jeune Elfe prénommé Arvendell ratissait les herbes en quêtes de graines de flaminas. Il mettait du cœur à l'ouvrage et ses yeux exercés n'avaient aucun mal à repérer les petits grains bruns qui jonchaient la terre.

Ce jeune Namida avait perdu ses parents prématurément et avait été recueilli par les moines du monastère de Gahl Drasyl. En ces lieux il était devenu adulte.
Un Elfe plutôt frêle, voire malingre, à la carnation d'une pâleur extrême et à la silhouette longue et anguleuse.
Ce physique peu viril ne lui permit pas de devenir soldat archer, aussi les moines le formèrent à la guérison, à l'herboristerie et aux sciences magiques.

Levant les yeux au ciel, Arvendell constata que le soleil était à son zénith. L'heure du repas devait approcher, aussi il décida de ratisser encore une bande de terrain avant de rentrer. Il eut raison de continuer...
En effet, en se penchant sur le monticule de feuilles et de tourbe qu'il venait de créer, il récupéra de nombreux grains, mais aussi une flèche. Un petit trait doré, de belle facture et certainement forgé dans un métal de grande valeur...

Un sourire illumina le visage d'Arvendell tandis qu'il ramassait ses affaires et se mettait en chemin.
Il avait glissé la flèche dans sa poche et ne cessa de la caresser de ses doigts maigres durant le chemin.
Que devait-il en faire? La donner aux frères? La garder pour lui... Après tout il l'avait trouvée et personne n'en saurait rien s'il décidait de la conserver...
Il atteignit bientôt le portail de la ville, et sa tête fourmillait toujours de questionnements...

Alors qu'il passait près de la vieille Falraëhn, la mendiante des escaliers de Gahl, il n'entendit même pas ses railleries et ses vils commentaires.
Tous les jours, elle lui proférait des insultes, ou des paroles destinées à le blesser, et chaque jour il se retenait pour ne pas lui faire de mal.
Mais ce jour, il était tellement absorbé par sa trouvaille qu'il ne prêta même pas attention aux vociférations de cette vieille folle...

"Tes parents... ils sont morts mais ce n'est pas vrai... Non non non, non jeune homme ils sont morts mais pas vraiment tu comprends!!! Vas les retrouver, ils t'attendent, ils t'espèrent... Oui ils sont morts, mais ils sont revenus, vas!!!"

La vieille était particulièrement loquace ce jour... et aussi particulièrement désorientée, Arvendell avait vu ses parents mourir de ses yeux...

Alors, une chose étrange survint...
La fléchette dorée que le jeune homme faisait tournoyer entre ses doigts s'anima d'une énergie surnaturelle. Elle transperça la poche de sa culotte et vint se planter devant la mendiante qui détala à toute allure en hurlant!!
Le jeune homme n'en croyait pas ses yeux... Il mit un temps avant de se pencher vers l'objet qu'il arracha du sol et glissa dans son autre poche.
Quelle était cette sorcellerie? Cette vieille menteuse avait-elle déchaîné les mauvais esprits?

Peu importe, les cloches sonnaient et il était grand temps de rentrer.
Arvendell courut jusqu'au monastère, entra en trombes et déposa le sac de grains dans la serre du "frère Pépin", comme il le surnommait. Il fila ensuite se débarbouiller et passa à table.
Le repas fut silencieux et rapide car frugal, comme tous les jours, aussi il ne lui fut pas difficile de conserver le secret de sa formidable trouvaille.

En quittant la table, le jeune orphelin regagna ses quartiers et, saisissant son trésor, il décida d'aller dans la salle des manuscrits afin de peut-être découvrir la nature de cet étrange objet.
Les ouvrages poussiéreux abondaient mais Arvendell, dont la tâche était aussi de ranger les livres et de cirer le parquet de la bibliothèque, sut de suite où chercher.
Il feuilleta des heures durant de nombreux volumes, et enfin, alors qu'il réprimait un bâillement, une page attira son attention.

Il lut un paragraphe en particulier...

"... La guerre faisait rage près de l'Elmasa, en cette Sainte année de l'an VI du règne Soradii. Les guerriers Drows assénaient de nombreuses pertes au Saint peuple Namida, le sang coulait et bien des têtes tombèrent.
Le Saint Seigneur de Gahl n'eut d'autre choix que d'envoyer ses troupes d'élite, et avec elles son grand champion, l'archer Perenthir dit "le juste doré". Les combats redoublèrent d'intensité, et les traits d'or du grand archer firent tomber les armées noires.

Mais, en Diccultia, après un regain de vitalité des troupes Namidas, un horrible malheur frappa le bien.
Perenthir fut encerclé et fait prisonnier par les adversaires. Ceux-ci, d'esprit perfide et malsain, le cagoulèrent et s'en amusèrent comme d'un pantin. Il le placèrent devant ses propres lignes, et lui ordonnèrent de tirer, les yeux bandés, sur ses amis soldats.
Cela leur promettait un spectacle sanglant et jouissif...

Le champion ne put que céder sous peine de mourir, mais, lorsqu'il décocha ses flèches d'or, un miracle survint...
Les projectiles, comme guidés par une force suprême, dévièrent de leurs trajectoires pour aller se planter dans les poitrails noirs des Drows.
C'est ainsi que le grand champion décima toutes les unités ennemies et rétablit la paix.
Tous vénérèrent alors ses flèches qui avaient su rétablir la vérité et l'ordre des choses...

Cette histoire est aujourd'hui encore obscure, et nul ne sait s'il s'agit d'un mythe ou de faits réels..."

Arvendell dut relire plusieurs fois ce récit avant de réaliser l'importance de sa découverte. Une flèche révélatrice de vérité et capable de discerner la pureté des intentions de chacun... C'était un miracle que cette trouvaille!

Cela signifiait que le jeune homme allait enfin pouvoir accomplir ses rêves et devenir magicien à la cour du Roi...
Ses pouvoirs étaient bons, il avait étudié avec zèle et passé chaque année le concours des arts magiques de la cour. Malheureusement, il n'avait pourtant jamais eu aucune réponse et se voyait chaque fois contraint de prolonger son séjour dans ce lieu saint qui devenait une prison à ses yeux...
Sa chance était-elle venue cette fois-ci?

Le jeune homme quitta les lieux, serrant sa flèche précieusement dans sa poche. Il passa devant de nombreux frères et eut du mal à contenir sa joie.

Lui que la chance avait oublié, il venait d'acquérir un pouvoir hors du commun, un pouvoir incommensurable!
Mais son entrain ne trompa pas le dirigeant du monastère, et celui-ci appela le jeune homme à lui en le voyant si souriant. Les questions fusèrent et le vieil ermite prit vite un air inquisiteur. Le jeune orphelin tenait bon et restait dans le silence le plus total.
C'est alors que cela recommença...
La flèche lui échappa de nouveau, et ce sous les yeux écarquillés du Frère supérieur. Le trait d'or vint se planter avec puissance sur le bureau, transperçant un tas d'enveloppes cachetées et manquant d' ouvrir la main de l'ecclésiastique...

Arvendell découvrit peu après que cette pile de missive était en fait les réponses de tous ses concours... et toutes étaient positives...

Le jeune homme quitta enfin le monastère et devint le plus grand des mages du Roi. Devenu riche et puissant, il n'oublia cependant jamais ses racines ni sa condition d'orphelin.
Il fit bâtir le pensionnat de Gahl et il exigea que le ratissage des champs de flaminas soit une des activités des enfants qui y seraient élevés.
Sait-on jamais, peut être qu'un jour un autre orphelin trouvera dans les dents de son râteau, parmi les graines, une petite flèche dorée...

Voici la légende qui a bercé ma jeunesse et qui émerveille encore, en l'an II, les petits Namidas qui aspirent à la carrière de magicien.

La flèche, conservée dans la salle des reliques du monastère, sert depuis à désigner les Rois Namidas. Elle discerne en eux la beauté de leurs desseins, la sincérité de leurs propos et la profondeur de leur amour pour leur peuple.
Notre bon Roi Ghan d'Ilf fut ainsi "approuvé" par le trait du "juste doré", de même que le furent tous ses ancêtres et que le seront tous ses nobles descendants...